François-René Rideau

Le mythe du "public" et du "privé"

(2014)

 



Note

Ce texte est apparu sur «Libres!!» opus 2, comme texte No. 42, pp. 107—108.

 


 

« Le "secteur privé" de l'économie est, en fait, le secteur volontaire; et le "secteur public" est, en fait, le secteur coercitif. » ― Henry Hazlitt

 

La propagande officielle ne cesse de parler de "public" et de "privé", et de polariser les débats en termes de "pour" ou "contre" l'un ou l'autre. C'est une manipulation. Si vous acceptez les termes de ces débats, vous avez déjà perdu, vous vous êtes déjà fait berner au-delà de tout ce qui compte. La distinction importante, du point de vue moral, et donc économique, est celle entre interactions volontaires, consensuelles, et interactions forcées, contraintes.

La distinction entre "public" et de "privé" n'est qu'un artifice de comptabilité fiscale: un gang possédant actuellement la suprématie de la force, se faisant appeler "État" veut faire croire qu'ils sont "nous", surtout concernant leurs actions qui mènent à perdre d'énormes sommes d'argent. Leurs actions qui en font gagner restent par contre "privées". Mais les monopoles légaux offerts à des entreprises dites "privées", et autres prébendes dont bénéficient les zommdelétas ne sont pas moins le fruit de la force exercée à l'encontre et des usagers et cons-tribuables qui paient l'addition, et des exclus qui ne reçoivent pas le service qu'ils voudraient, et des producteurs potentiels dont les services sont prohibés. De même, une personne dont l'emploi est contrôlé par un monopole "public" peut offrir un service qui serait volontairement échangé même sans monopole, et serait à la fois plus efficace et mieux payé, sans être entravé et corrompu par un appareil bureaucratique.

Cette distinction "public, privé" relève du sophisme comptable: une astuce fallacieuse qui prétend substituer un événement comptable (comparaison avant après) à un calcul économique (comparaison entre plusieurs alternatives). Or jamais une entrée sur un livre de compte ne peut révéler si le choix correspondant valait mieux que les alternatives qui n'ont pas été essayées! Par contre, la menace de violence inhérente à toute action étatique ou para-étatique révèle ipso facto que le choix nuit à celui qui acquiesce sous la contrainte — l'usage de la force est un jeu à somme négative qui nuit forcément plus aux uns qu'il ne profite aux autres. Le but de ce sophisme est de tromper les victimes du vol "légal", pour qu'elles se laissent tondre plus facilement, voire même aident à se tondre les unes les autres.

S'il faut entendre par "privé" ce qui relève de décisions prises par un individu, dans son intérêt propre, que cet individu ait l'esprit étroit ou large — alors tout est "privé"! Sous prétexte d'agir au nom du "public", une clique s'empare du pouvoir: les zommdelétas, politiciens bureaucrates, ou officiers d'entreprises et associations privilégiées, accaparent et contrôlent les ressources créées par autrui, et instituent leur propre irresponsabilité légale vis-à-vis des conséquences de leurs décisions. Ce qui se cache derrière le mot "public" est donc la négation de la propriété, un régime d'insécurité où les producteurs ne jouissent pas des fruits de leur labeur, mais peuvent à tout moment être la proie des prédateurs officiels.

Et s'il faut entendre par "public" ce qui relève d'actions qui affectent tout le monde, alors tout est "public": tout humain qui se respecte voit plus loin que lui-même, a des ambitions — c'est ce qui le pousse à agir, à réussir. Et toutes les actions honnêtes, jeux à somme positive, se font au profit de tous, cependant que toutes les actions malhonnêtes, jeux à somme négative, se font au détriment général. Là encore, l'équation faite entre l'action des zommdelétas et ce qui bénéficie au public est un double mensonge: car ce sont bien les actions "privées", consensuelles, qui bénéficient au public, cependant que les actions dites "publiques", fondées sur la contrainte "étatique" sont ipso facto nocives, sinon dans leur objet, du moins dans les moyens coercitifs de leur mise en œuvre.

D'ailleurs, s'il fallait croire que l'État est source de tout le bien social, d'où viendrait ce désir d'aider les masses chez les zommdelétas? Seraient-ils d'une race supérieure d'anges altruistes, destinée à régner pour mille ans sur les vils gueux égoïstes dégénérés qui constituent le "public"? Voilà une curieuse revendication en criante contradiction avec le simulacre "démocratique" duquel nos élites prétendent tirer leur légitimité. Non, en fait, l'État est rempli de narcissistes, d'arrivistes, de menteurs psychopathes assoiffés de pouvoir, qui ne font rien qui bénéficie au public que par ce qu'ils y sont contraints par le poids de l'opinion publique — et qui le font d'une façon qui leur bénéficie à eux-mêmes qui contrôlent les détails plus que le public, lequel voit surtout la propagande.

La plupart des gens sont essentiellement des producteurs honnêtes et bienveillants — sans quoi toute société aurait été impossible. Certes tout le monde a bien la tentation parfois de se comporter en prédateur, mais la défense des victimes ou les représailles des honnêtes gens les maintiennent dans le rang. Il y a des gens sans scrupules, mais justement, le monopole du pouvoir les attire comme des mouches, et ils s'empressent de rejoindre les rangs de la bureaucratie irresponsable et du parasitisme institutionnel.

La seule question in fine, c'est celle de la responsabilité: Que celui qui agit bien, avec ses propres ressources, soit récompensé par la valeur propre de ses travaux et la reconnaissance "volontaire" d'autrui, voilà un cercle vertueux, celui du comportement économique. Que celui qui n'est pas tenu comptable de ses actes sur ses ressources propres soit récompensé pour son talent à accaparer les ressources d'autrui — voilà un cercle vicieux, celui du comportement politique: vol, violence, contrainte.

La politique est toujours plus spectaculaire, plus grandiose; c'est elle qui conquiert le devant de la scène, et organise la propagande à sa gloire. Mais c'est un parasite. On ne peut voler de valeurs que celles créées par d'autres. L'économique, qui n'est jamais montré sauf pour le dénoncer, est bien plus grand et toujours plus productif que la politique n'est prédatrice... ou sinon, c'est l'inéluctable déclin, la dé-civilisation.

Le mythe du "public" c'est l'irresponsabilité institutionnalisée par la force — mais le pire, c'est quand cette institution s'empare des esprits et corrompt les âmes, et sape les fondements de la civilisation. Le siècle dernier a montré moult exemple de pays qui sont retournés à la barbarie. Profitez de ce qui reste de la France, elle ne durera pas longtemps!

 


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